Effets du stress sur les apprentissages

Qu’est-ce que le stress ?

Le stress est une réaction biologique programmée et utile. Il prépare l’organisme à répondre aux événements auxquels il fait face à un moment donné, grâce à un afflux d’hormones (les plus connues étant l’adrénaline et le cortisol) permettant de mobiliser les organes directement concernés, tout en mettant les autres organes en deuxième ligne. Néanmoins, dans nos sociétés où beaucoup est exigé de tous, à tous les niveaux, le stress a vite tendance à prendre des proportions démesurées, il devient envahissant et même parfois chronique. A ce stade, il n’est plus utile de manière positive et utile, mais devient toxique : les hormones déversées dans l’organisme le sont en bien trop grande quantité. Dès lors, les sentiments qu’elles génèrent (la peur, la colère) ne préparent plus l’organisme à se défendre, mais le submergent. Par ailleurs, la chronicité de ces décharges de stress font qu’une empreinte négative s’installe dans l’organisme : une personne subissant des décharges élevées et fréquentes de cortisol sera souvent triste, découragée, pessimiste.

Quels sont les facteurs de stress les plus fréquents pour un enfant ?

Ils sont particulièrement abondants dans le milieu scolaire. Faire le choix de l’Instruction en Famille (IEF) est en soi un premier pas de taille vers la réduction du stress de l’enfant – à condition toutefois de ne pas reproduire à la maison les schémas qui le créent et l’entretiennent à l’école.

  • L’exigence de performance imposée à l’école et/ou à la maison 
  • La comparaison avec les autres enfants
  • Le rythme journalier imposé à l’enfant et l’irrespect de ses besoins physiologiques primaires (être dehors, passer beaucoup de temps à jouer, aller aux toilettes/manger/boire quand le besoin s’en fait sentir, etc)
  • Les tensions relationnelles intrafamiliales ou extérieures
  • La difficulté à trouver sa place dans le monde en général, et dans son monde en particulier (sa famille, son entourage proche)
  • L’imaginaire – l’enfant a tendance à s’imaginer des situations bien pires que la réalité, c’est pourquoi il est essentiel de ne pas lui mentir ou masquer quoi que ce soit, mais bien de lui expliquer la réalité avec des mots qu’il peut comprendre
  • Le stress des parents – et oui, les enfants, surtout les plus petits, ressentent notre stress, et se l’approprient. C’est un phénomène psychique bien connu : on dit communément que les enfants sont des « éponges »
  • Il semble qu’il y ait aussi un facteur génétique. Avoir des parents particulièrement stressés et angoissés serait une prédisposition pour l’enfant à l’être également.

Quelles conséquences sur les apprentissages et pourquoi ?

Nous l’avons déjà évoqué, un excès d’hormones du stress, particulièrement du cortisol, freinent les apprentissages. L’interaction se fait au niveau cérébral : l’hippocampe, essentielle pour permettre la mémorisation à long terme , se voit totalement paralysée par l’excès de cortisol. Elle n’est donc tout simplement plus en mesure de retenir ce qui lui est dit. Cet impact concerne le stress dit chronique. Un élève qui est soumis à un exercice qui le stresse sur le moment, est en fait stimulé : le stress joue ici son rôle positif, et prépare l’organisme à mobiliser toutes les facultés nécessaires afin de répondre au mieux à la demande. C’est dans ce contexte que des gens pourront par exemple dire qu’ils font toujours leur travail à la dernière minute car le stress les stimuleEn revanche, il en va tout autrement pour un organisme soumis à un stress permanent. Un enfant maltraité chez lui, ou dont un des parents est malades, ou bien un enfant qui est en souffrance à l’école, pour X raison, subira la toxicité du stress chronique. Ce qui se passe dans ce cas, c’est que l’organisme subit une surcharge d’hormones de stress. Celles-ci se déploient davantage encore lorsque l’enfant est soumis directement à son vecteur de stress principal (le parent maltraitant ou malade, l’instit trop sévère, d’autres élèves malveillants, etc). Dans un réflexe de protection, certains organes se ferment. C’est le cas donc pour le siège de la mémorisation : l’hippocampe. Ceci explique qu’il est totalement vain de s’échiner à vouloir instruire un enfant qui a peur. Plus l’adulte criera ou imposera l’apprentissage, plus l’enfant sera tétanisé en son fort intérieur. Il est essentiel de retrouver un environnement d’apprentissage serein si l’on veut favoriser la mémorisation à long terme.

Comment savoir si mon enfant est stressé ?

S’il présente souvent les symptômes suivants :

  • Il est agité, il a la « bougeotte »
  • Il a un discours défaitiste, pessimiste « c’est trop dur, je n’y arriverai jamais »
  • Il a un comportement agressif, s’emporte facilement (« au quart de tour », comme on dit communément)
  • Il fait de nombreuses erreurs 
  • Il cherche à s’isoler plus que de coutume
  • Il a mal quelque part ou est malade

Il est important de s’alarmer (selon les âges) lorsque l’enfant :

  • se détourne des apprentissages 
  • fuit les interactions sociales et recherche constamment l’isolement
  • n’a plus goût à jouer.

En effet, s’ils sont variables selon les individus, les effets prolongés du cortisol sur l’organisme n’en sont pas moins dramatiques. Selon les cas, cela peut donner les résultats suivants :

  • chute drastique de l’estime de soi et implantation du sentiment d’impuissance apprise
  • troubles du sommeil et de l’alimentation
  • somatisations générales (mal au ventre, migraine, éruption cutanée, etc)
  • adoption de troubles obsessionnels du comportement (TOC)
  • baisse du système immunitaire
  • installation d’une maladie chronique qui persistera à l’âge adulte
  • installation d’un état dépressif chronique, pouvant aller jusqu’au suicide

Globalement, il est important de souligner que le stress chronique a des effets délétères sur le cerveau de l’enfant, qui peuvent entraîner des lésions graves et irrémédiables. La perturbation de la mémoire en est une, mais celle du système immunitaire, moins connue, en est une autre et elle est désormais indéniable. A ce titre, il semble pertinent de rappeler que l’usage de violences éducatives joue un rôle particulièrement nocif et certain dans l’implémentation du stress chronique chez l’enfant – et ce, que ces violences soient perpétrées à l’école comme à la maison.

Comment lutter contre le stress au quotidien ?

On l’a déjà dit, faire le choix de l’instruction en famille est un grand pas en ce sens. Il permet d’éliminer bon nombre des facteurs de stress liés à la vie en collectivité (compétition, rythme, etc).

Néanmoins, même en étant en IEF, le stress peut persister, ou bien venir s’installer.

D’abord, soulignons que dans un processus de déscolarisation, il est important de laisser le temps à l’enfant de s’adapter à son nouveau mode de vie, et de se défaire des caractéristiques stressantes du milieu scolaire. Cette « déscolarisation mentale » est également nécessaire pour les parents : principalement afin d’éviter qu’ils ne reproduisent, même inconsciemment, les facteurs de stress d’une scolarité classique. En IEF, on retrouve par exemple souvent des familles qui s’interrogent sur la durée journalière des enseignements dispensés, paniquant parce que la durée à la maison est bien moindre que celle de l’école – ce qui est tout à fait normal ! en classe, les élèves sont 25 ou 30 (au mieux), alors qu’à la maison l’enfant est seul ou avec quelques frères et sœurs, et qui plus est entouré de ses parents.

Quand la déscolarisation mentale est faite, ou quand il n’y en a pas besoin faute de scolarisation préalable, il est important de maintenir un environnement sain et de ne pas laisser le stress s’y faufiler. Comment faire ? On lâche prise ! à tous les niveaux, car on n’est plus dépendant d’une institution, mais libre de nos choix. Ce qui signifie que : 

  • on n’est pas obligés de se soumettre à un rythme effréné. On laisse tomber les rythmes classiques : on peut très bien ne pas travailler le lundi, mais plutôt le dimanche, ou pendant les vacances. En laissant les choses se faire, un rythme qui convient à votre famille va naturellement se mettre en place, peu à peu
  • on n’a pas des exigences surhumaines. L’apprentissage se fera d’autant mieux que personne n’a la pression. On n’oublie pas que nous ne sommes pas dans une classe de 30 élèves : il est inutile de faire travailler l’enfant toute la journée comme à l’école, car les conditions sont totalement différentes
  • on ne se laisse pas envahir par les posts anxiogènes qui courent sur les groupes IEF des réseaux sociaux : chaque enfant est différent et tout le monde se développe à son propre rythme
  • on ne se laisse pas non plus envahir par la peur de l’inspection et les exigences de l’EN. Afin de se préparer au mieux, renseignez-vous sur les sites dédiés, lisez vous-même les textes de lois ainsi que les exigences du socle commun – soyez sûr.e de vous en sachant réellement ce qui est requis en fonction de votre enfant
  • on crée un environnement propice aux apprentissages : clair, bien rangé, pas surchargé, avec des ressources et du matériel facilement accessibles par tous.

Enfin, on prend le temps d’être totalement à l’écoute de son enfant et de ses besoins : 

  • comment se sent-il : peut-être que tel jour une pause sera nécessaire, alors que tel autre l’enfant sera particulièrement disposé à apprendre (et si la pause dure une semaine, ou un mois, ça n’est vraiment pas dramatique. Dans un environnement détendu, l’enfant apprendra sans s’en rendre compte, juste en observant le quotidien qui l’entoure)
  • qu’aime-t-il : en se focalisant sur les centres d’intérêt de l’enfant, on stimule en lui cette petite étincelle qui le fait vibrer, ce qui facilite considérablement les apprentissages et la mémorisation. Partir de l’intérêt de l’enfant est un véritable atout.

 

 

Anne-Catherine Proutière, fondatrice du blog « Pédagogies alternatives en liberté », pour Pass éducation