« L’éducation n’appartient pas à l’école » | Résumé de conférence

« L’éducation n’appartient pas à l’école » Isabelle Peloux — Innovation en éducation 2019

Isabelle Peloux est la directrice de l’école du Colibri au centre agroécologique des Amanins, dans la Drôme.

Au cœur de cette ferme pédagogique, le but est de montrer comment vivre dans la sobriété heureuse. Ils ont été accompagnés dans la philosophie de leur projet par Pierre Rabhi, qui leur a posé deux questions : « quelle planète laisserons-nous à nos enfants ? » « Quels enfants laisserons-nous à la planète ? » En construisant le lieu, les membres de l’équipe se sont aperçu qu’ils ne savaient pas coopérer. Ils ont donc suivi des formations de Communication Non Violente, et autres formations. 

La co-éducation 

Évaluation d’un enfant de 18 ans. Sur son cumul de vie, il a dormi pendant 7 ans, il est allé à l’école pendant 1 an et 8 mois, il est resté dans sa famille pendant 5 ans, il a fait des activités extrascolaires pendant 2 ans, et il est resté devant les écrans 2 ans et 4 mois. Donc, de croire que l’école est le lieu où l’on éduque les enfants est une erreur fondamentale puisque c’est là qu’il passe le moins de temps. Ainsi, il faut que toute la société reprenne en main la question de l’éducation, parce que tout le monde éduque tout le temps. L’éducation est l’affaire de tous. Ce n’est pas l’enseignant qui sait mieux comment éduquer un enfant par rapport aux parents. En tant qu’enseignant, il faut avoir la confiance des parents pour pouvoir avoir la confiance de l’enfant. Tout l’art de l’école et des parents est de travailler ensemble pour arrêter de croire que l’un sait mieux que l’autre : c’est prendre conscience que l’on ne parle pas du même aspect de l’enfant (l’intimité/le groupe). Il est important que l’enfant ait un espace où grandir, dans lequel il se retrouve dans un groupe qu’il n’a pas choisi. L’attitude de l’enfant est complètement différente qu’il soit dans l’environnement familial que dans un groupe. Cela va lui permettre de travailler la fraternité avec celui qu’il ne connaît pas et qui est différent. Dans la co-éducation, au lieu de se poser la question de pourquoi l’enfant « ne pousse pas droit », nous allons chercher les solutions pour l’aider l’enfant à « pousser droit ». Instinctivement, nous allons chercher qui est le coupable et nous allons avoir le réflexe de dire : « ce n’est pas moi ! ». Autant du côté des enseignants que des parents. En éducation, la croyance est que si l’enfant a des comportements jugés incorrects, il ne faut pas dire que c’est de ma faute. L’idéal en éducation n’existe pas. Co-éduquer, c’est aller dans le monde de nos enfants pour savoir ce qu’il s’y passe. En éducation, nous jouons avec le vocabulaire mais aussi avec nos passions, notre intime, nos convictions personnelles. On met tellement d’affectif dans les mots, qu’il y a certains mots interdits comme le mot « effort ».

Le mot « effort »

Souvent les personnes avec qui on emploie le mot « effort » soit sombre, soit s’élève. Pour avoir une bonne estime de soi, il faut faire des choses qui m’ont demandé un effort. Si je fais des choses faciles, je ne sais pas de quoi je suis capable. Pour faire quelque chose qui m’emmène plus haut, que je m’élève, que je sois fière de ce que je fais, il faut que cela ait été difficile. Ce qui est sympa dans l’acte d’apprendre c’est quand on trouve, que l’on réussit et qu’on a l’énergie du YES !

L’inspiration

Dans l’école du Colibri, l’équipe s’est inspirée de ce qu’il existe dans les autres écoles hors contrat. Et ils ont rajouté ce qu’ils voulaient, ce qu’ils étaient, les méthodes ne correspondant pas forcément à tout le monde. L’éducation est vivante, mouvante, toujours en tension. Si on crée du lien avec une personne, tant qu’on ne bouge pas tout va bien mais s’il n’y a plus de mouvement, on s’ennuie et on n’a plus envie de faire du lien. Et si nous avons envie de rentrer en mouvement, cela peut créer des tensions : des conflits. Le conflit ce sont des êtres vivants qui se mettent en tension. Le conflit est vivant. À nous d’amener de l’intelligence relationnelle, de regarder ce qui s’y passe. Comment mener cette vie qui circule pour faire émerger le meilleur de nous-mêmes et non pas la partie qui râle.

La complémentarité des loups

Dans l’école du Colibri, les enfants ont travaillé sur l’histoire des deux loups, un conte amérindien, qui explique que nous sommes habités par deux loups. Les enfants ont donné des noms à ces loups : le loup Pestouille et le loup Koum. Ils ont trouvé des mots pour qualifier ces deux loups, trouvant plus d’adjectifs pour le loup Koum. Les enfants ont constaté qu’ils ont beaucoup ri en parlant du loup Pestouille, mais pour le loup Koum, leur rire était plus attendrissant, plus calme. Il faut donc transférer notre énergie émergée pour ce loup Pestouille pour faire circuler la vie et alimenter le côté du loup Koum. Ces deux loups sont complémentaires, car le loup Koum tout seul est gentil, mais ne sait pas se défendre. Alors que le loup Pestouille représente notre capacité d’indignation, notre force de la contestation. Il faut donc co-éduquer ces deux parties, les faire coopérer à l’intérieur de soi-même. Mon énergie doit garder toute sa qualité d’indignation, mais avec bienveillance.

Notre mission éducative

Unipaz, l’école de la paix au Brésil, parle d’éducation à l’appel : être en paix avec soi-même, avec les autres et avec son environnement. Voici une belle mission éducative pour nos enfants qui vivent sur une planète qui est malade. C’est le temps des alliances ! Ce n’est plus le temps de se comparer, de chercher qui a tort ou raison. Nous devons être humble, être en paix, avoir une bonne estime de nous-mêmes, et ne pas hésiter à collaborer, à travailler ensemble pour mettre nos compétences en commun . Nous devons élever notre conscience pour sortir plus grand.

 

 

Sylviana de Lamour en Vadrouille, pour Pass éducation