Maria Montessori : naissance et critique de la pédagogie scientifique – PDF à imprimer

Née en 1890, en Italie, Maria vient d’une famille bourgeoise. Si sa mère lui laisse beaucoup de liberté, son père s’oppose rapidement à sa volonté de poursuite des études médicales. A 26 ans, elle est pourtant l’une des premières femmes médecins diplômée de son pays. Dès 1900, elle s’intéresse à la pédagogie, et crée la première Casa dei Bambini en 1907, dans un quartier populaire de Rome. Elle y accueille des enfants de 3 à 6 ans : les parents y ont libre accès. Cette école sera le lieu d’expérimentation de Maria : elle y créera sa pédagogie scientifique.

 

Les maîtres de Maria Montessori

Maria Montessori se réclame de deux influences majeures : Jean-Marc Gaspard Itard (1774-1838) etde son élève Édouard Séguin (1812-1880), dont elle traduira les œuvres en italien afin de les méditer.Alors qu’elle est assistante de psychiatrie, elle commence à s’intéresser aux enfants « idiots ». Elle découvre le travail d’Édouard Séguin, tout d’abord maître, puis médecin : « partant des expériences d’Itard, Séguin les appliqua en les modifiant et en complétant la méthode ». Jean Itard est un médecin français, spécialiste de la surdité et de l’éducation spécialisée. Il est connu notamment pour ses travaux réalisés à partir du cas de l’enfant sauvage de l’Aveyron. Ses écrits rassemblent « des descriptions minutieuses – très intéressantes – d’expériences pédagogiques » : il fut le premier éducateur à pratiquer l’observation des élèves. Maria a alors l’intuition que ces pratiques actives sont la clé vers la libération de l’esprit de l’enfant : « Je suivais le livre de Séguin, et je faisais mon trésor des admirables expériences d’Itard : je fis en outre fabriquer, guidée par ces tests, un très riche matériel ». La pédagogie scientifique est donc naturellement la somme des expériences de trois médecins, collectant leurs expériences sur plus de 50 ans de préparation active.

Les influents

Pestalozzi (1746-1827), pédagogue éducateur et penseur suisse, a transformé les classes lugubres en pièce familiale. « Le cœur maternel de Pestalozzi », selon le titre d’une étude de Ferrière, rend leur liberté aux enfants. Sa célèbre maxime : « Apprendre avec la tête, le cœur et la main » semble trouver un écho dans la pédagogie Montessori. Même si la Doctoresse ne s’est pas directement inspirée de ses pratiques, il semble évident, malgré tout, que ces dernières, dans l’air du temps, ont influencé son agencement de classe. Fröbel (1782-1852), pédagogue allemand, amena le « bricolage » dans les jardins d’enfants. Il préconisait une activité manuelle soutenue afin de favoriser l’éveil de l’enfant. Mais le maître continuait de guider les activités de l’enfant. « Pestalozzi a donné aux enfants la liberté sans matériel, Fröbel leur a donné un matériel sans la liberté ; moi, j’ai donné la liberté avec un matériel », disait la Doctoresse à son élève, Hélène Lubienska de Lenval.

Les confrères de l’Education Nouvelle

Maria Montessori fut une figure phare de l’éducation nouvelle, même si, de nos jours, on retient plus facilement les noms de Freinet ou de Piaget. On compare souvent les vies d’Ovide Decroly et de Maria Montessori : nés la même année, ils entrent en même temps à l’Université de médecine, s’occupent ensuite d’enfants aliénés et fondent leur école pour enfants normaux en 1907. Tous deux veulent libérer l’enfant, le laisser suivre son orientation, mais la ressemblance s’arrête là. Decroly préconise un retour à la nature, est partisan d’une méthode globale d’enseignement, sans ordre ni chronologie. Maria Montessori crée ses écoles en pleines cités, et insiste sur le besoin de former les enfants dans la société dans laquelle ils sont amenés à vivre. J’aime à imaginer qu’une rencontre entre Rudolf Steiner et la Doctoresse aurait été fructueuse en termes d’échanges passionnés. L’anthroposophe (1861-1925) crée sa première école à Waldorf en 1919. Il y applique sa philosophie : les enfants sont regroupés par tranche d’âge, l’enseignement suit les rythmes de l’enfant, il insiste sur le développement sensoriel de l’enfant, même s’il ne s’appuie pas sur un matériel spécifique. Il décrit l’enfant de moins de sept ans comme un être éthéré qui a besoin de s’ancrer dans le monde réel. Maria Montessori parle de l’âme incarnée : « En général, les théories modernes de la nouvelle éducation considèrent l’enfant comme une chair animée, tandis que l’enfant révèle par excellence le merveilleux travail occulte d’une âme en train de s’incarner ».

Les détracteurs

On reproche à Montessori sa « froideur », son « absence d’imagination », souvent d’ailleurs en ne s’appuyant que sur son matériel. Mais celui-ci n’est qu’un vecteur de la pédagogie scientifique. Il peut en être le support, mais n’est pas l’essence même de la philosophie Montessori. C’est occulter toute l’ambiance d’une classe : les murmures, l’activité respectueuse du travail de chacun, les déplacements silencieux et affairés, l’entraide ; et par la suite, la passion exprimée dans les Grands récits, qui interpellent l’enfant au cœur de son imagination et lui font entrevoir mille portes à ouvrir. Charlotte Mason (1842-1923), pédagogue britannique, a été l’une des plus virulentes détractrices sur le travail de la Doctoresse. Elle lui reproche de mettre du mercurochrome sur une jambe de bois et, dans une lettre à son éditeur, prend l’exemple d’un pays imaginaire, Kranconopolis, où l’on applique des idées révolutionnaires : puisqu’un homme sans bras avait développé d’extraordinaires aptitudes avec ses pieds, tous les enfants de 3 à 6 ans devaient apprendre à écrire, dessiner avec les pieds… Il fallait leur lier les mains, afin d’éviter qu’ils ne les utilisent. Charlotte Mason s’insurge ainsi contre le matériel Montessori qui ne peut, selon elle, convenir à des enfants normalement constitués. Qu’on soit convaincus ou non, Maria Montessori a marqué durablement son époque… et continue à susciter l’engouement dans le monde entier !

 

 

Isableue, pour Pass Education