Les ateliers de vie pratique au sein de la pédagogie Montessori, à quoi ça sert ? – PDF à imprimer

Pour les enfants âgés de 2 à 5 ans, les ateliers de vie pratique pourraient s’apparenter au fait de jouer à la dinette et autres jeux du même style, cependant ce n’est absolument pas le cas. Les plateaux de vie pratique, à condition qu’ils aient du sens, sont les amis du cerveau de l’enfant. Ils répondent à la fois au besoin d’imitation de l’enfant (il est donc important d’utiliser des objets de la vie quotidienne et non des jouets) et leur besoin de faire travailler leurs fonctions exécutives en plein développement.

L’intelligence se construit, prenons-la au sérieux.

Soyons vigilants. N’attendons pas de substituts de réalité – telles que les dînettes en plastique – qu’ils aident nos enfants à développer leur intelligence exécutive. Donnons aux enfants des motifs d’imitation réels. Tout d’abord parce qu’ils sont intéressés par les objets que nous utilisons (spécialisation au milieu) ; ensuite parce que de faux objets ne permettent pas à l’enfant d’exercer ses compétences exécutives : ils n’offrent ni but réel, ni contrôle de l’erreur. Sans but réel, l’enfant n’a pas à planifier les étapes et à les garder en mémoire pour atteindre un objectif (mémoire de travail), et n’a, par conséquent pas besoin d’ajuster les étapes et ses stratégies (flexibilité cognitive). Une assiette en plastique utilisée brusquement ne casse pas, elle n’offre donc aucun feedback immédiat et ne permet pas à l’enfant d’ajuster ses gestes, ni de canaliser son attention (contrôle inhibiteur). Dînette en plastique, aliments en plastique, faux objets, fausse cuisine, faux instruments de musique, et autres substituts de notre réalité seront bientôt cassés, égarés ou oubliés. Nos enfants s’en lasseront vite et il en faudra d’autres, plus colorés, plus ceci ou plus cela, et la spirale infernale s’enclenche : cela ne sera jamais assez. Et c’est bien normal, leur intelligence ne peut s’exercer avec de tels objets : ils simulent la réalité sans jamais atteindre l’intérêt d’un objet réel utilisé par l’adulte, et frustrent l’intelligence exécutive en plein développement. Extrait du blog de Céline Alvarez. Dans cet extrait, nombreux sont les mots issus des sciences cognitives. Avant d’aller plus loin, nous vous proposons un petit lexique :

Les fonctions exécutives :

Les fonctions exécutives correspondent aux capacités nécessaires à une personne pour s’adapter à des situations nouvelles, c’est-à-dire non routinières, pour lesquelles il n’y a pas de solution toute faite. Nous sommes tous sujet à des situations non routinières, des situations pour lesquelles nous n’avons pas mis en place d’automatismes. Ces situations vont faire appel à nos fonctions exécutives car elles demandent l’élaboration d’un plan pour réaliser la tâche. Des capacités sont alors nécessaires telles que :

  • L’inhibition (contrôle inhibiteur). Inhiber, c’est réaliser un changement interne qui freine ou empêche un comportement. Il s’agit de bloquer certains comportements, de se les interdire. L’inhibition permet d’avoir un comportement social adapté, et surtout non déplacé par rapport à l’environnement dans lequel on se trouve. Inhiber nécessite de prendre un temps de réflexion. Or, un temps de réflexion demande aussi un fonctionnement par étapes et donc de planifier. Sans ce délai de réflexion, les réponses sont données de manière simultanée.

D’un point de vue du comportement, on parle d’impulsivité. Il y a donc aussi une notion de tri. Inhiber veut donc aussi dire sélectionner certaines informations pour en éliminer d’autres.

  • La planification. Planifier, c’est : organiser selon un plan et des méthodes déterminées, organiser à l’avance son temps, ses activités selon un certain plan, organiser à l’avance quelque chose, l’avoir dans son plan. Une difficulté à planifier sous-entend donc une difficulté à organiser une série d’action permettant d’atteindre un objectif. Planifier nécessite de maitriser la notion de temps ; autrement dit estimer la ou les durées et surtout se représenter correctement mentalement cette durée : en avoir une image mentale juste.
  • La flexibilité mentale ou cognitive. Être flexible, c’est s’adapter à des circonstances particulières. La flexibilité mentale est donc une souplesse mentale, son contraire est la rigidité. Cette fonction est nécessaire notamment lorsque la situation n’est pas routinière, qu’elle n’est pas automatisée, qu’elle n’a pas été apprise, cette situation nouvelle demande une adaptation : un changement doit donc s’opérer. Il va donc falloir élaborer des hypothèses et évaluer la pertinence et la non pertinence de chacune afin d’apporter une réponse adaptée à cette nouvelle situation.
  • L’attention. On distingue différents types d’attention :
  1. L’attention sélective qui  permet de porter son attention sur l’information pertinente et de ne pas se laisser distraire par des informations non pertinentes. C’est donc la capacité de se focaliser, de se centrer sur un seul point et d’en ignorer les autres.
  2. L’attention soutenue : elle permet de maintenir son attention sur une même tâche pendant un temps assez long. Cette attention fait appel à notre vigilance.
  3. L’attention divisée permet de faire deux choses à la fois.  C’est la capacité de partager des informations venant de plusieurs sources (visuelles, auditives) pour pouvoir les traiter.

 

La mémoire de travail :

La mémoire de travail décrit une mémoire à court terme permettant de stocker et de manipuler temporairement des informations afin de réaliser une tâche particulière, tel un raisonnement. Nous commençons donc à comprendre l’importance des activités quotidiennes de vie pratique.

« Lorsque le jeune enfant reproduit le quotidien avec lequel son cerveau s’est structuré ; lorsqu’il mange seul, lave son assiette, met ses chaussures, coupe des fruits, aide son petit frère à s’habiller, il challenge ses compétences exécutives en pleine formation : il doit focaliser son attention en inhibant toute distraction (contrôle inhibiteur), il doit garder en mémoire les différentes étapes et les planifier (mémoire de travail), corriger les gestes et les stratégies inadaptées (flexibilité cognitive). » Céline Alvarez.


Certains ateliers ont aussi des objectifs indirects, une préparation préliminaire à certaines compétences demandées au sein du socle commun de l’Education nationale.

Exemple : apprendre à laver une table.

Dans la vidéo qui va suivre, il se peut que vous vous demandiez pourquoi montre-t-on à l’enfant qu’il faille faire des ronds… Certains enseignants y verront là une préparation au graphisme… plus tard, on leur demandera de dessiner des ronds puis des lettres. Et pourquoi, essuyer la table de cette façon ? Dans quel sens écrivons-nous dans les pays occidentaux ? De gauche à droite, nous sommes d’accord et lorsque nous arrivons au bout de la ligne, nous levons notre crayon afin de revenir au début.


Autre exemple : apprendre à presser une éponge.

Dans la vidéo qui suit, on comprend nettement la raison pour laquelle, apprendre à effectuer ce geste est intéressant d’un point de vue motricité mais aussi et surtout un entraînement imparable pour la mémoire de travail.


Dernier exemple : Visser et dévisser des boulons

Cette activité est une pure merveille concernant le développement de la motricité fine et ce que ne montre pas la vidéo, c’est que l’enfant peut aisément s’entraîner à utiliser une fois sa main droite, une fois sa main gauche avec ce matériel notamment :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On dévisse avec une main, on revisse avec l’autre.


Parce qu’il est peu coûteux de mettre en place ses activités à la maison et en classe, nous vous encourageons à mettre au moins une étagère à hauteur de l’enfant sur laquelle vous aurez soigneusement préparé vos plateaux, veillez à les changer régulièrement.

Quelques exemples ci-dessous :

Coudre

 

 

 

 

 

 

Découper du papier

 

 

 

 

 

Enfiler des élastiques

 

 

 

 

 

 

Dresser la table

 

 

 

 

 

 

Nettoyer un miroir

 

 

 

 

 

 

Ouvrir et fermer des bouteilles

 

 

 

 

 

 

 

Plier du tissu

 

 

 

 

 

 

Tailler des crayons

 

 

 

 

 

 

 

 

Transvaser des petites graines

 

 

 

 

 

 

Trier des graines

 

 

 

 

 

 

 

Utiliser des pinces à linge

 

 

 

 

 

 

 

Verser de l’eau avec une théière

 

 

 

 

 

 

 

 

Delphine Bessière, pour Pass education